(c) Elisabeth Carecchio

La pièce de Michel Vinaver mise en scène par Christian Schiaretti est redoutable en ce sens qu’elle matérialise tout ce que le citoyen-spectateur redoute des manigances politiques et des marchandages financiers. La scénographie est labyrinthique, plongeant la scène dans un clair-obscur, avec des ombres dansant au rythme des tractations, des trahisons et des compromis. La profondeur historique et biographique est donnée par la voix des aïeux des Bettencourt, deux voix émanant du fond de scène, isolées mais perceptibles, telles des fantômes resurgissant pour donner sens à ce fait-divers converti en fable politique. Mais la pièce est redoutable aussi par son efficacité : dans ces ténèbres louvoyantes, le rire est attribut de l’analyse. Les dialogues sont d’une finesse et d’une beauté rares dans ce genre cynique en langage de tous les jours, le rythme est enlevé, le jeu précis et agile. L’ingéniosité théâtrale mise au service de la mascarade politique pour montrer la perfidie des puissants devenus pantins des adroits qui les entourent et les étouffent.