Shochiku Grand Kabuki

Shochiku Grand Kabuki

(c) Patrick Berger

C’est une plongée au cœur du théâtre traditionnel japonais à laquelle nous invite la compagnie Shochiku dans le cadre de la saison culturelle japonaise Japonisme 2018. Mêlant le chant (ka), la danse (bu) et les arts de la scène (ki), le kabuki est un art ritualisé, dont les moindres détails – de la mise en mouvement jusqu’au plus infime trait de maquillage – sont minutieusement reproduits depuis la période d’Edo. « Narukami », la première des deux pièces présentées durant la soirée, a ainsi été créé en 1684 tandis que « Iromoyô Chotto Karimame » vit le jour au début du xixe siècle, époque où les dramaturges du kabuki rivalisaient d’ingéniosité et de provocation. Si les intrigues des deux œuvres, un brin surannées, peinent à entrer en complète résonance avec le spectateur contemporain, la complexité des poses, la subtilité musicale et chorale et l’infinie rigueur de l’interprétation des deux stars du kabuki nipponnes Nakamura Shidô II et Nakamura Shichinosuke II participent grandement à l’enchantement de cet étonnant voyage artistique. On notera l’absence notoire de femmes au plateau – le comédien onnagata est capable de jouer aussi bien la femme que l’homme. Absence d’autant plus ironique que le kabuki trouve ses origines en 1605, dans le travail de chorégraphie et de dramaturgie d’Okuni, danseuse kyotoïte. En 1630, quand les gestionnaires des maisons closes se mirent à utiliser le kabuki et ses danses suggestives pour attirer les clients, les femmes furent privées de scène. Le répertoire kabuki se construisit – et se perpétue toujours – en se passant de leur présence.