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Anne et Alfred viennent d’avoir un enfant. C’est sur ce mince argument que Fredrik Brattberg, auteur norvégien encore peu connu en France, tisse la trame de “Winterreise”. A la manière d’un Jon Fosse, ce n’est pas dans les dialogues aux airs triviaux qu’il faut chercher le sens, mais dans les creux et les non-dits. C’est ici, dans ces creux, que le drame quotidien se noue. Brattberg nous montre ce à quoi, on l’imagine, bon nombre de jeunes parents sont confrontés : l’angoisse de la dissolution du soi dans la parentalité. Entre tropisme nordique et “unheimliche” freudien, l’angoisse créée est si tenue, si fragile qu’elle est mise à mal par une musique qui surligne plus qu’elle n’accompagne. A contrario, la scénographie souligne avec grande subtilité le propos : l’espace sur lequel se déroule la pièce est légèrement de guingois. Comme les personnages. On n’est pas sûr·e·s de ce qu’on voit, mais on pense bien déceler un léger décalage, juste assez pour semer le trouble. Est-ce la scène, est-ce Anne et Alfred ? Ou est-ce nous ?