Yuki Moriya – Courtesy of Yamaguchi Center for Arts and Media

L’idée de la rencontre entre un artiste de flamenco et l’intelligence artificielle (IA) serait née dans l’esprit d’Akiko Takeshita, productrice à l’institut japonais Yamaguchi Center for Arts and Media (YCMA), après une prestation si précise d’Israel Galvan qu’il lui aurait fait penser à une machine. Or, dans la performance “Israel & Israel”, “dialogue” interactif entre le danseur et la machine, l’artiste espagnol est tout sauf mécanique. Ainsi du moment où, en pleine exécution d’un flamenco hiératique sur des rythmes imposés par un ordinateur, Galvan a senti s’ouvrir la fermeture d’une de ses bottes mais a continué sans désemparer. Ce moment d’imperfection, en instillant une émotion dans le public, en apnée jusqu’au soulagement final devant l’adversité surmontée, s’est révélé comme la parfaite métaphore du devenir de l’artiste face à l’IA. Si ce spectacle est mémorable, c’est principalement dû à l’incroyable modernité du flamenco proposé par Galvan – précis et dépouillé – et accessoirement à l’apport de l’IA. Comme l’a rappelé Galvan à l’issue de la représentation, jamais un ordinateur ne fera d’erreur. Devant l’émotion suscitée par un interprète dansant sans faillir malgré des chausses capricieuses, les rythmes parfaits et froids reproduits par l’IA à partir d’une captation des pas de l’artiste sont apparus encore plus clairement comme ce qu’ils sont : un simple artifice, un moyen, certes habile, de cacher la vérité, mais à jamais incapable d’approcher le Flamenco tel qu’exprimé ici par un génie.