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Promesse de revitalisation féministe du mythe maeterlinckien, le « Mélisande » de Richard Brunel aligne pour ce faire quelques indices de protocole performatif : seaux d’eau en plastique au lieu des fontaines peintes, bâches blanches et modules métalliques, fragmentation hybridante de l’espace où musicien.ne.s, comédien.ne.s et chanteur.se.s se rencontrent pour mieux emporter le texte hors du signe. L’opération entend restituer la liberté d’une héroïne qui n’est pas écrite comme elle est souvent représentée, c’est-à-dire comme une jeune femme à la merci des projections et des prisons masculines. L’acte réussit çà et là, en particulier lors de la scène inaugurale de l’anneau perdu, où l’intériorité et la corporéité indomptables de Judith Chemla emportent alors la représentation hors des contrariétés golaudiennes. Mais l’opération est éventrée par la plupart des scènes où règnent encore des gestes d’emprise dont nous pourrions largement nous passer, surtout que l’écriture suggestive de Maeterlinck ne les prescrit pas. Les matières performatives deviennent alors quelque peu décoratives (la lumière au fond des seaux en est un symptôme). Tandis que que le choix d’expliciter le potentiel passé de Mélisande par le conte inaugural de Barbe Bleue semble quant à lui confondre le mystère du personnage avec un traumatisme inactualisable, teintant alors son parcours d’une souffrance qui n’a elle non plus pas grand chose d’émancipateur.