(c) Agathe Poupeney

Avec “Samsara”, mot qui désigne le cycle des renaissances successives dans lequel les êtres non éveillés sont pris, la chorégraphe Jann Gallois continue sa quête d’un sens à donner à la vie humaine. Dans cette sixième création de la Cie BurnOut, l’absence de conscience personnelle est symbolisée de façon très littérale et percutante par de longues cordes qui relient les interprètes les uns aux autres, entravant leurs mouvements tout en les obligeant à se déplacer en coordination.

Le spectacle suit la naissance et l’apprivoisement d’une conscience personnelle et collective, la première n’allant pas sans la deuxième, semble nous dire Jann Gallois et les artistes qui l’entourent. Car ce que nous dit très bien la chorégraphe, c’est que l’individuel ne devrait pas prévaloir sur le collectif mais fonctionner main dans la main avec lui. Dans “Samsara”, l’éveil de la conscience passe par une étape douloureuse. Après la jubilation du groupe qui ne fait qu’un et ne se pose pas de question, ce qui est à la fois une joie et une souffrance pour qui se poserait la question de l’individualité mais n’est que joie pure pour celui qui n’a pas conscience d’une individualité possible et évolue comme un tout avec les autres, arrive la difficulté de l’indépendance. Difficulté double : au courage qu’il faut pour tenter de se soustraire au groupe s’oppose ledit groupe qui n’aime pas trop ceux qui ne marchent pas au pas.

Le constat est ainsi doux-amer. Survivre, et ne plus se laisser manipuler par la drôle de machine sur scène, serait donc faire un compromis. “Samsara”, dans une parabole de l’éveil à la conscience qui pourrait tout aussi bien être une image des trois stades de la vie, semble nous dire qu’une indépendance totale ne serait ni utile, ni souhaitable et nous encourage, puisque les chaînes ne se brisent pas, à apprendre à jouer avec pour qu’elles ne nous entravent plus. La masse informe devient, alors, ensemble d’individualités qui, elles, forment le collectif.