À qui la faute ?

La Convivialité

fautes-orthographeUne ancienne confiserie de la rue Thiers détournée en salle à manger rustique accueille une forme brève pour le moins originale, « La Convivialité », proposée par les Belges Arnaud Hoedt et Jérôme Piron. Sur le trottoir, des spectateurs-convives attendent de passer de l’autre côté du rideau pour prendre place à table, autour d’un verre. Au lieu des trois coups, une question : « C’est quoi, votre niveau d’orthographe ? »

La veille, une amie comédienne me confiait ses réticences à écrire (pour I/O) : « Je suis nulle en orthographe, c’est la honte ! » Pour moi, les fautes d’orthographe c’est une signature, un peu comme avoir les dents du bonheur ou une chevelure rousse. La faute à mes années de fac de lettres, durant lesquelles j’ai été endoctrinée par deux terroristes : Vaugelas et Grevisse. Alors ces 25 minutes dans le boudoir de la langue tombent plutôt bien.

D’anecdote en anecdote, on comprend que la faute est la bâtarde progéniture d’accidents de l’histoire, de la fixation d’erreurs et d’idéologies. Un dispositif transmédiatique sert de support pour déconstruire le mythe de la faute de français. La scénographie, qui s’annonçait muséographique avec ces lourdes vitrines et étagères, prend vie au moyen d’une série de détournements d’objets et de titres, qui jouent avec les possibilités : transcription phonétique, coquets hellénismes, lettres muettes, ombilic ubique du Collège de ’Pataphysique – la valeur normative de la langue serait avant tout arbitraire. Une bonne nouvelle pour les phobiques de la dictée.

Si le spectacle s’en prend aux hussards noirs et aux fantasmes républicains, vers où navigue cette prometteuse galère linguistique ? Bâti sur la langue curiale de Paris, le spectacle laisse sur la côte 274 millions de locuteurs francophones (1. Chiffre sans doute extrapolé par les sbires de l’OIF. 2. Erratum : 274 millions – 66 millions de Français = 208 millions). Bref, bizarre pour des Belges.