En équilibre sur un fil

Chatons violents

Chatons Violents

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Océanerosemarie fait la chronique de ses « Chatons violents » au théâtre des Béliers et ne se contente pas d’imiter ses matous à la perfection : elle bruite, elle chante, elle braille, elle couine, elle brame (oui, oui, son bestiaire vocal est très riche) pendant plus d’une heure sans jamais s’essouffler. Car l’humoriste ne tient pas en place et se tient mal tout court, comme si l’Agrippine de Bretécher avait pris possession de son corps.

Le spectacle quant à lui est en équilibre sur un fil. Une entrée en matière à l’humour convenu prolonge inutilement sa « Lesbienne invisible » (2012) et campe un monde grossièrement divisé entre « hétérotes » et « goudous » qui ne m’évoque rien d’autre qu’un remake lesbien de la trilogie Laroque/Palmade.

Tandis que je réfléchis au post Facebook qui déconseillera ce spectacle, « Chatons violents » remonte subitement la pente, jusqu’aux cimes des hashtags « BIM », « MDR » et « FYI ». Le chaton sort enfin les griffes et bondit sur un guignol contemporain, le « BBB » (« Bon Blanc Bobo »), alter ego de « l’Héritier » dans mon glossaire bourdieusien. Bye bye comédie-sentimentale-ringarde, hello galerie-de-portraits-cruels-à-la-Riad-Sattouf. Je passe alors de la panique à l’approbation, avec hochements de tête et tout et tout.

Car Océanerosemarie s’attaque au territoire idéologique miné des « BBB » : paternalisme républicain, bienveillance narcissique de gauche, culpabilité postcoloniale de façade, infantilisation pathologique de l’immigré, tyrannie de la laïcité… Autant de symptômes d’une prédisposition à la domination, à la verticalité. Une verticalité désormais ébranlée par des chatons violents rétifs à l’injonction : « Chat de gouttière tu es, chat de gouttière tu resteras. »