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Amour : mot valise pour désigner l’ensemble du lien et de l’espérance à l’autre. Mot dont la seule certitude réside en son imprécision dans sa nature et son engagement implicite, systématiquement différemment interprétés dans leurs implications par les humains. Buenos Aires : ville fantasme, où la moiteur creuse la cambrure des belles, où le drame et la comédie se mêlent en une danse d’une sensualité sans limite. Tango : rite ancestral où la femme et l’homme, sans mots, transcendent l’attente à l’autre pour s’offrir en vérité, sensualité et énergie quasi divine. Preuve d’Amour : pièce qui unit ces trois protagonistes dans leur face-à-face éternel de quête de fusion entre les êtres, de demande de sécurité réciproque. De poésie de l’humain.

Intentions, désirs, névroses, tout se mélange sous la plume distanciée autant que dense de Roberto Arlt. Une femme s’offre à un homme, elle en attend un engagement. Il fait un pas de côté : comment savoir si le désir de la femme est centré sur son anima ou sur sa posture sociale, la sécurité qu’il apporte ? Jeu miroir de deux angoisses, être aimé pour soi ? Egoïsme éternel du couple fusion. Et s’il n’était rien ? S’il abandonnait tout et venait nu s’offrir à cette grâce, serait-il aimé ou rejeté ?

Les acteurs, d’une sobriété puissante, s’engagent, se désengagent, s’offrent et se refusent. Tango arabesque magnifié par les lignes épurées de la cité personnage, envoûtant. Sensualité permanente sublimée. Saisi au cœur, le spectateur vit une plongée familière à tous ceux qui un jour ont prononcé ces paroles merveilleuses et terribles : je t’aime. A la sortie, une vérité : on n’en revient jamais.