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On aimerait voir trois fois de suite « Hikikomori ». Trois fois parce qu’il existe trois versions du texte, adaptées en fonction de l’âge du spectateur, et entre lesquelles on vous demandera de choisir avant de vous tendre un casque à l’entrée de la salle. Enfin une pièce adaptée aux enfants où les adolescents ne pesteront pas et où les adultes ne s’ennuieront pas. L’hikikomori c’est cet adolescent, souvent japonais, qui décide un beau matin de ne plus sortir de sa chambre. Ici, le reclus volontaire, c’est Nils. Et la version que nous avons choisie, c’est celle de son père.

Le casque, c’est la grande idée de Joris Mathieu. Quoi de mieux pour recréer l’isolement du personnage que d’isoler le spectateur dans la tête de l’un des protagonistes ? Car si l’hikikomori du titre est Nils, son père aussi semble avoir quelques difficultés avec le monde extérieur. Artisan miniaturiste, il échappe à sa propre vie en branchant son casque sur le monde intérieur de son fils. Mais tout ceci existe-t-il réellement ?

L’auteur de la pièce, Antoine Volodine, s’essaye à un genre volontiers casse-gueule : la voix-off théâtrale. Plus qu’un monologue, c’est une pièce-poème sur la difficulté de vivre qui, comme l’écrivait Jean Cocteau, ne s’arrange pas. Les nouvelles technologies rassemblent autant qu’elles isolent. Les hommes, les femmes, les adolescents, tous sont perdus et cherchent une échappatoire à un quotidien bien morose. Le casque, c’est la porte ouverte vers un monde imaginaire, une forêt où chacun peut devenir ce qu’il souhaite, revenir à l’état sauvage, loup ou orignal.

Si la mise en scène souffre de quelques longueurs (les allers-retours de la mère apportant de quoi survivre à son enfant), le tout est sauvé par l’utilisation de la vidéo. Images de synthèse ou prise de vue réelle, la poésie du texte est délicatement soulignée par Loïc Bontemps et Siegfried Marque. Un collectif à suivre.