La crise des réfugiés expliquée aux enfants

Au-delà de la forêt, le monde

Créé en novembre 2016 au théâtre São Luiz de Lisbonne, « Au-delà de la forêt, le monde » est le fruit de la collaboration entre Miguel Fragata et Inês Barahona au sein de leur compagnie Formiga Atómica. Leur précédent spectacle, « La Marche des éléphants », était un travail autour de la mort, et les voici de retour avec un sujet ancré dans l’actualité : la crise des réfugiés.

« Le point de départ a été notre envie de mélanger l’esprit des contes et histoires traditionnelles avec l’histoire contemporaine, ce qui se passe à travers le monde. On a l’impression que les enfants sont de moins en moins préparés à la réalité », précisent-ils. Du coup, la question des migrants leur a semblée cruciale et urgente. Mais en aucun cas il ne s’agit de faire larmoyer dans les chaumières. Miguel et Inês, fort heureusement, n’aiment pas ces spectacles où l’on prend les enfants pour des imbéciles et où les adultes s’ennuient. Le pitch de la pièce est simple : deux jeunes enfants afghans, dont le père a été tué pendant la guerre, sont envoyés par leur mère en Europe afin d’essayer de les sortir d’un cercle de vengeance et de violence. On suit plus particulièrement le parcours de l’un d’entre eux, Farid, jusqu’à son arrivée à Calais et ses tentatives pour traverser de l’autre côté…

Le duo s’est appuyé sur de très nombreux récits de migrants, pour essayer de coller au plus près au regard des enfants : « Nous voulions parler de l’actualité telle qu’elle est perçue par les enfants, conserver leur façon de voir le monde. » Pour beaucoup, l’Europe est vue comme une sorte d’utopie. Paris serait ainsi une ville, selon certains témoignages, où un avion sillonne les airs pour diffuser du parfum… On imagine la déception du jeune garçon en débarquant à Châtelet ! En dépit de son sujet grave, « Au-delà de la forêt, le monde » est un spectacle empreint d’humour. Car l’objectif est aussi pédagogique : pouvoir expliquer aux enfants des sujets compliqués, créer une résonance avec ce qui se passe autour d’eux. « En France, leur perception est nécessairement différente de celle des enfants portugais, la question des réfugiés est plus présente », précisent-ils. Pour la version française, le texte a été adapté et est interprété par deux nouvelles comédiennes, Émilie Caen et Anne-Élodie Sorlin. Ce sont elles qui portent l’intégralité du récit, comme un conte oral traditionnel. Miguel conclut : « C’est un spectacle engagé, oui, mais surtout humaniste. En portugais on dit “estar no mesmo barco” (“être dans le même bateau”)… voilà une expression qui, avec la crise des réfugiés, prend tout son sens aujourd’hui ! »