A 85 ans, Michel Legrand a offert au théâtre du Rond-Point son tout premier récital de piano solo, pour une date unique ce 17 janvier. Une sorte de défi ludique pour une légende vivante multi-oscarisée qui n’a plus rien à prouver, si ce n’est sa capacité à garder l’enthousiasme et la légèreté d’un enfant de cinq ans. Si le répertoire est ultra-attendu (succession des “tubes”, allant des “Moulins de mon coeur” du film “L’Affaire Thomas Crown” aux “Demoiselles de Rochefort”), c’est dans l’interprétation que tout se joue. Bien qu’il soit, de son propre aveu, dans la “phase classique” de sa carrière, Legrand témoigne ici de son talent d’improvisateur passionné : variations rythmiques, modulations, solo jazzy, parfois jusqu’à l’excès, mais que ne lui pardonnerait-on… Et, surtout, un storytelling musical mélodique prouvant qu’il n’a pas besoin d’orchestration pour s’exprimer. Deux petits bols d’eau ont été placés aux extrémités du piano afin d’éviter que les doigts secs du pianiste ne dérapent, mais ils le feront tout de même : s’il ne fait pas de doute que Legrand fatigue un peu, la joie est restée intacte, ainsi que la capacité à la transmettre. Mention négative, toutefois, à cette prise en otage du public à la fin du concert, pour une discussion un poil certes intéressante mais un tantinet hagiographique et longuette avec le journaliste musical Olivier Bellamy (et sertie d’un Boulez-bashing démagogique).

A suivre cette année, une tournée à travers le monde avec orchestre (85 concerts) et notamment une date exceptionnelle à Pleyel le 10 mars, à Nantes le 1er avril et au Trianon de Paris le 7 juin.