© Ruth Walz

C’aurait dû être l’occasion d’un transport, d’une élévation. Mais l’échelle de Dominique Blanc, alias Vierge Marie, aussi symbolique soit-elle de l’Ascension à venir, ne suffit pas insuffler à la mise en scène de Deborah Warner la vitalité qu’on lui espérait.

La faute en est, d’abord, au texte de Colm Tóibín, tiède récit naturaliste coincé entre un roman d’Eric-Emmanuel Schmitt et un chapitre du “Royaume” d’Emmanuel Carrère. Une dramaturgie mollasse que renforce le manque de nerf du projet ; les saynètes bibliques, clichés du catéchisme primaire, s’enchaînent sans parti pris réel, si ce n’est l’intimité psychologique de cette femme ordinaire, anecdotiquement mère de Dieu, coincée dans le fatum d’un mauvais drama antique. Précis mais ultra démonstratif, le travail de Warner a été plus inspiré dans le passé : fallait-il vraiment faire résonner dans l’Odéon le bruit métallique des clous qu’on enfonce tandis que Marie décrit la crucifixion ? Fallait-il la musique (envoûtante, mais) redondante de Mel Mercier ? Fallait-il encourager le public à venir sur scène avant le début du spectacle, dans le but peu subtil de nous convertir en “témoins” ? (que ceux qui n’auraient rien compris consultent l’étymologie du mot “testament”).

Quant à Dominique Blanc, bien sûr, elle garde quelque chose de la Phèdre de Chéreau, déchirante d’humanité, rageuse et fragile, à la diction impeccable, à la présence souveraine ; mais c’est utiliser une Lamborghini pour aller faire ses courses au Franprix. On l’aurait aimé au service d’une grâce spirituelle, gnostique (à défaut d’être intellectuelle, on l’aura bien compris), qui manque cruellement à cette proposition non dénuée de beauté, mais un peu vaine.