Elle dit construire par son corps des archipels. En gardant son audience tout près d’elle, une utopie d’espace nouveau prend un aspect sensible et se laisse modeler le temps de la performance ; le public devient à la fois frontière poreuse et naufragé volontaire de son monde. La danseuse chorégraphe italienne propose dans ce court solo un grand voyage dans le sens où le dépaysement est total. Et même si cette forme a vocation à être jouée dans les espaces les plus divers, c’est dans le poumon vivant d’un éden tropical que l’imaginaire s’envole. Soulignons l’incroyable bande-son qui accompagne vigoureusement dans ces contrées lointaines et qui permet à l’interprète toutes les métamorphoses. Magnifique danseuse, elle sera hiératique face au vent, chamane précise et musclée dans les percussions et les râles, liane dans les chants des oiseaux et des hommes. Toujours elle se faufile, ancrée dans la terre et appelée par le ciel. On pourrait se croire téléporté dans un film d’Apichatpong Weerasethakul, même si la brume chaude et humide n’existe que dans nos souvenirs, mais après l’orage et le grognement du tigre c’est finalement dans une transe apaisée et joyeuse qu’elle nous délie de l’envoûtement. Expérience synesthésique à vivre sans hésiter.
Dépaysement
Trigger