À deux pas du soleil, exactement…

Dimanche, midi. Au bord du lavoir, près du chemin André-Gide, résonne joyeusement le Cuba : un « apéro cubain » est proposé par Christophe Haleb, avant la projection de son film « Un sueno despierto ». Voilà donc un festival qui s’annonce sous les meilleurs auspices. Ceux, festifs, de la proximité et de l’échange.

Depuis vingt-deux ans, la petite ville paisible d’Uzès accueille sous le soleil de juin son festival de danse, qui s’étale cette année du 10 au 17 juin : elle y autorise dans la plus grande simplicité la confrontation d’artistes confirmés et de jeunes débutants, à qui le festival, remplissant son rôle de centre de développement chorégraphique, donne une chance, parfois même en coproduisant les spectacles. Il y fait beau et pas moins de 30 degrés, le public est détendu, le short et le débardeur sont légion, et les prix abordables (il vous faudra débourser 10 euros par spectacle en général).

On y voit quoi, à Uzès ? Les propositions sont variées : les tonalités y sont larges et un accompagnement réflexif après les spectacles est même proposé, avec des dialogues entre artistes et spectateurs menés par Olivier Hespel, critique et dramaturge. On se sent bien ici, entre les spectacles, à l’image du bar du festival, installé dans les jardins de l’évêché, où canapés et fauteuils vous attendent pour un verre de vin. Cette année, pas moins d’une demi-douzaine de coproductions Uzès Danse sur la quinzaine de propositions ! Et les deux tiers sont des créations de 2017. C’est dire la vitalité qui anime ce centre de développement chorégraphique dirigé par Liliane Schaus.

Cette année, David Wampach est l’artiste associé du festival. Il y présente « URGE », où l’expression des corps criant la sensualité dans un décor métallique explose l’étrangeté d’un dialogue du geste. Il montre aussi « Veine », une création de 2014. Et il a également confié, en tant qu’artiste associé, la direction artistique d’« Uzès, chemin de danse à l’école » à Rachel Garcia, un projet d’éducation à la danse auprès des Uzétiens, rituel que le festival met un point d’honneur à mener chaque année. Pour l’édition 2016-2017, ces Uzétiens sont les écoliers de cinq classes, et le travail est restitué dans l’église Saint-Étienne, où il fait bon venir se rafraîchir.

C’est en effet dans des lieux publics, des espaces de la vie des Uzétiens que le festival s’installe : l’église Saint-Étienne donc, le jardin de l’évêché, le lavoir ou le Jardin médiéval sont cette année les lieux investis par Uzès Danse, rapprochant les espaces de la ville à la familiarité des Uzétiens.

En quelques jours, on découvre, entre les rues médiévales et le marché de la place aux Herbes, les nouvelles créations de Gaëlle Bourges, un beau « Conjurer la peur » qui revient sur la justice, les peurs collectives et l’élan de rébellion nécessaire à l’humanité autour de la fresque de Sienne – une jolie performance de groupe –, ou celle de Léa Moro, qui, avec « Fun! », revient dans un spectacle mêlant pop, théâtre, danse tout en décalages, sur l’exhortation au plaisir. La proposition, étrange et nuancée, entre créatures d’ailleurs et humanité profonde, de Magali Milian et de Romuald Luydlin (avec également Anna Vanneau), intitulée « Bleu », avait ouvert le festival sous les meilleurs auspices ! Comme partout, et c’est tant mieux après tout, on aura eu de mauvaises surprises (le très abscons « Indivisibilité » de Laurent Pichaud, ou l’encore très vert « Sa prière » de Malika Djardi) et connu d’agréables découvertes (Paula Pi, « Ecce (h)omo », qui bouscule les frontières du genre et du temps avec une malice délicieuse).

Uzès Danse est solidement localement ancré à quelques kilomètres de Nîmes : une échappée entre soleil, terrasses, danse et nonchalance d’Occitanie – qui dit mieux ?