I/O n°73 [édito] : Voir des images/Contrer la peur

Qui mieux que Marcel Proust pour nous dire à tous comme l’enfance façonne et détermine ce que chacun sera ? À lire encore celui que le traumatisme des soirs d’été sans les baisers de sa mère a poursuivi jusqu’à la mort, on apprend ainsi cela : « Pour bien éduquer, il faut certaines vertus. » Si les conseils éducatifs de celui qui préféra passer sa vie durant ses petits matins aux bras du baron de Charlus plutôt qu’à lever des enfants qu’il n’avait pas peuvent sembler dispensables, écoutons-le tout de même, car les génies connaissent tous les jours, même ceux qu’ils ne vivent pas. En l’occurrence voyez plutôt. Voyez comme les vertus méritoires et combatives de la danse sont belles, et comme le corps dit tout quand sur le plateau il s’expose aux yeux de ceux qui l’écoutent. Partant de là, il serait bien imbécile de croire qu’il n’est pas urgent d’emmener vos enfants porter sur les spectacles de Petits Pas les pupilles qui sont celles des adultes qu’ils seront demain. Si elles ne sont éducatives, les vertus de ces œuvres seront au moins génératives. Génératives d’images-souvenirs comme seuls la scène et les plateaux du monde peuvent en créer, et qui ainsi que les mots rassureront pour toujours vos enfants devenus grands. Dans un monde où la terre tremble chaque jour des larmes que l’homme y dépose, il s’agit certainement du plus beau cadeau que vous pourrez leur faire, car un enfant rassuré est un adulte qui ne craint plus… et quoi de plus beau qu’un homme qui ne connaît pas la peur ?