Trait tendance

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D.R.

L’expression « bad buzz » est tellement vulgaire qu’elle ne prend son sens que dans la bouche de Jean-Marc Morandini, et, au théâtre, c’est un spectacle raté où on vous promet une cascade mais où le comédien déguisé en abeille oublie son texte parce que ce comédien, dont je tairai le nom imaginaire, a trop bu. Il a fêté la première hier soir à Avignon. Cinq pintes y sont passées, plus un digestif de fruits douteux. Le retour jusque sur son lit fut épique, surtout au moment où il le vivait. Et maintenant, ce soir, face à nous, alors qu’on ne parle que de lui, le bafouillage. Bien fait pour lui, c’est pas professionnel. Tout le monde sait que tout se décide la première semaine. Dans le OFF, il faut enchaîner sept bonnes représentations pour que ça mousse. Pourquoi ? Élémentaire, Dr Marketing : parce que le nombre de spectateurs reste croissant s’il part sur une tendance croissante. Et comme le festival est limité dans le temps, c’est imparable. De savants calculs qui multiplient et subdivisent la déperdition, la météo, le ton sur lequel les commentaires sont lâchés, la proportion de retraités, d’amis et le nombre de places gratuites n’y changent rien : cela reste à la marge. Le noyau dur en expansion de la première semaine, quand le niveau artistique est au-dessus de la moyenne, est inarrêtable : ce sera un succès. C’est le même phénomène que dans la propagation virale des campagnes de publicité sur le Net. Sauf que les marques ont moins de risques de se louper : elles répètent toujours la même chose, et une comédienne bourrée dans une publicité pour du fil dentaire, ça se voit pas. En plus, on peut augmenter artificiellement – maintenant en temps réel – l’exposition en mettant un peu plus d’argent, si justement la tendance est baissière… Mais ce sera le signe que c’est une moins bonne pub que la moyenne… Ah mondes jumeaux cruels !