Jamais, on n’arrive jamais vraiment. On avance, plus ou moins vite, on s’élance passionnément, puis on fait une pause, on repart de plus belle, on s’égare parfois dans d’invraisemblables détours avant de se remettre sur la bonne voie, mais on n’arrive jamais vraiment, et c’est tant mieux.
Écrire, imaginer, fabriquer un spectacle ou composer la musique, c’est un voyage incertain et continu, sans terminus. C’est un élan vers, qui n’aboutit pas, car nul artiste ne peut prétendre arriver au bout de son art, ni ne peut affirmer quand il sera arrivé au sommet de celui-ci (si un jour il y parvient).
Ce voyage, on peut ou on doit parfois l’arrêter, momentanément bien sûr, contraint par le temps, les échéances, l’arbitraire d’une multitude de contingences très concrètes qui font notre réel au quotidien. Avec toujours ce petit goût amer d’inachevé, de « c’est bien mais j’aurais pu faire mieux »…
Cette quête de l’absolu, vouée à l’échec, demeure un moteur puissant qui pousse à un dépassement de soi permanent, à une sorte de transcendance, et qui nous meut et nous émeut, nous propulse dans une lancée intense et jouissive, à la découverte des plus lointaines et mystérieuses contrées de notre intériorité créative.
Quand est-ce qu’on arrive ? On n’arrive pas. Et c’est tant mieux.