Le Centre Pompidou fête ses 40 ans. À l’occasion, le musée propose des événements partout en France. À Lille, les commissaires Bernard Blistène et Marcella Lista organisent une exposition qui met en honneur une des pratiques artistiques les plus complexes de l’art contemporain : la performance. Manifestation liminale où se retrouvent la danse, la vidéo, la musique, les arts visuels et le théâtre, la performance est devenu non seulement un genre artistique en soi, mais aussi un outil épistémologique pour comprendre notre époque. Notre efficacité dans le monde du travail, la façon dont on se présente devant les autres, notre goût pour le dépassement, pour les records (sportifs, sexuels), la fascination pour la mise en scène de soi, tous cela peut-être compris grâce au concept de la performance. Aujourd’hui, ce n’est plus la pensée cartésienne qui l’emporte, mais le « je performe, donc je suis ». Dans cet état des choses, une telle rétrospective s’avère pertinente.
L’exposition se déroule en deux temps et dans deux espaces : La Gare Saint Sauveur, transformée en espace artistique, et le Tripostal, où se trouvent la plupart des œuvres. À Saint Sauveur, les commissaires nous présentent des pièces de la collection Nouveaux Médias autour de l’idée du jeu. Il s’agit d’une réflexion sur cette activité humaine, où les règles et la répétition se mettent à l’oeuvre pour questionner les rôles assignés. Nous parcourons l’espace en regardant les différents écrans, tout en marchant sur une installation de l’artiste Cildo Meireles, composée de 6000 km de fils de coton noir. Pourtant, la subtilité du jeu se perd : on découvre maladroitement que nous sommes obligés à « jouer » avec cette matière omniprésente. L’oeuvre la plus remarquable de ce volet est celle de Francis Alÿs, « Children’s Games », une série d’enregistrements de jeux d’enfants du monde entier.
Au Tripostal, la collection de travaux est divisée en trois étapes : « Mouvement sur mouvement », « Scènes de gestes » et « Objets d’écoute ». C’est l’opportunité pour le grand public de découvrir les travaux de grands artistes comme La Ribot, Vito Acconci ou Pierre Huyghes. Pourtant, la qualité des œuvres dans chaque section est bien inégale, et parfois on comprend difficilement les choix des commissaires (une des seules performances live, « Tell me » de Guy de Cointet, est tellement théâtrale qu’elle n’est pas très représentative de ce genre artistique). On arrive à trouver aussi de vraies pépites qui méritent d’être vues : « Shadow Play » de Hans-Peter Feldmann, ou « Body Double 35 » de Brice Dellsperger.