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Voilà un mois à peine que Wajdi Mouawad annonçait son départ du Théâtre de la Colline. Lui voici déjà un successeur. En effet, Rachida Dati a nommé précipitamment l’acteur et metteur en scène Francis Huster à compter de mars 2026 pour que celui-ci ait le temps de développer un projet financier et artistique d’envergure pour le théâtre national.
Après ses prestations mémorables dans « Le Dîner de cons » ou « Le Maître du Zodiaque », le grand public a oublié combien Francis Huster est aussi un metteur en scène audacieux et injustement absent de la collection “mettre en scène“ des éditions Actes Sud. Il dirige régulièrement la Troupe de France et fut le chef, au crépuscule des années 1990, de l’humblement nommée Compagnie Francis Huster, très engagée dans la popularisation du grand répertoire et dans celle de Francis Huster.
L’artiste nous a livré en exclusivité certaines lignes de force et quelques grands noms pour la future saison 2026-2027 dont il rêve. C’est par le cycle théâtral « Molière mausolée » que devrait débuter la traversée husterienne. On connaît l’engagement acharné de l’artiste pour la panthéonisation de Molière, et il a naturellement souhaité confier tous ces grands rôles à son fidèle ami Jacques Weber qui les interprètera en alternance sur le grand plateau, entouré par la jeune troupe du théâtre (dispositif créé par Wajdi Mouawad, et dont l’actrice Ingrid Chauvin, avec sa « Méthode Dolmen », sera désormais la responsable pédagogique).
À l’occasion du focus « Vous les femmes », Catherine Marnas créera les « Liaisons dangereuses queer », et Muriel Mayette mettra en scène Carole Bouquet et Gérard Holtz dans « Partage de midi » de Paul Claudel. Sera aussi confiée à Stanislas Nordey, nouvel amoureux du vaudeville, une adaptation théâtrale dégenrée des « Valseuses » de Bertrand Blier. François Gremaud proposera de son côté des explications de texte performées dédiées à Molière, à destination des collégiens et des séniors. Charles Berling reprendra son adaptation remarquée du film « Vivre sa vie » de Godard. Fidèle à l’esprit fondamental du Théâtre de la Colline, Francis Huster souhaite aussi faire la part belle aux écritures contemporaines et s’entoure à cet effet d’Eric-Emmanuel Schmitt comme auteur associé.
Schmitt dirigera d’ailleurs une école d’écriture (La « Molière Cool Kids ») associée au théâtre, donnant à des auteur·rice·s méconnu·e·s du grand public (François Hien, Claudine Galea, Pascal Rambert ou encore Falk Richter), la chance de trouver leur endroit par ses conseils et d’être mis en espace dans la petite salle ; et ce à l’occasion du festival printanier « Te prends pas pour Molière ! ». Et les amateurs de formes particulièrement radicales ne seront pas en reste : un temps fort (« Molière à la sulfateuse ») leur sera dédié, où l’on pourra découvrir les dernières expérimentations des trois T de la jeune innovation scénique (Tommy Milliot, Théo Askolovitch et Thomas Jolly). Jean-Michel Ribes lira de son côté ses « Notes sur Notte » au bar du théâtre tous les soirs. Tandis qu’on fêtera le centième duo d’interprètes des « Gros patinent bien » de Martin-Salvan & Guillois, avec Thierry Beccaro et Jean-Luc Reichmann qui reprendront la pièce de carton culte et enchanteront le mois de décembre. Tandis qu’Yves Beaunesne mettra en scène Angelica Liddell dans un biopic musical sur Sainte Thérèse d’Avila.
« Le théâtre public doit redevenir le lieu du PUBLIC ! ET LE PUBLIC FRANÇAIS EST ENFANT DE LA LANGUE DE MOLIÈRE ! J’IRAI ME RECUEILLIR SUR LA TOMBE DE JEAN-BAPTISTE POQUELIN DIT MOLIÈRE AU PÈRE LACHAISE CHAQUE MATIN ET CHAQUE SOIR EN SORTANT DU THEATRE !!!! » hurla joyeusement Francis Huster en clôture de conférence de presse. A ce moment là, le sang de Wajdi Mouawad, récemment versé au Collège de France, fit plus d’un tour. De son côté, Mouawad entame jusqu’au 8 mars 2026, jour de son départ choisi comme un hommage aux féministes, un « parcours christique » que ses adeptes pourront suivre en live sur le site du théâtre.