Julius Caesar

Julius Caesar

« Julius Caesar » est un Shakespeare méconnu en France – et pour cause : la parole déborde tant l’action que les dialogues et les soliloques en cascade amenuisent l’espoir de s’amarrer à des rives enthousiastes. Mais Nauzyciel a l’intelligence d’exacerber l’hermétisme de la pièce (qu’il reconnaît) en recentrant la parole autour d’un tempo mantrique : la diction parfaite des acteurs américains, enrobée d’une doucereuse atmosphère jazzy des sixties et d’une chorégraphie discrète signée Damien Jalet, a (lentement) fait d’entraîner son spectateur dans une danse lâche et intranquille. À l’opposé de chez Pommerat, où le public représente l’assemblée, ici il devient le confident de Brutus – le mur qui a des oreilles – pendant qu’au Sénat les personnages clament leurs diatribes face à des bâches au lointain figurant une salle vide. D’où le sentiment d’assister à un spectacle du mauvais côté ; le charme hypnotique du mur fera ou pas son effet.