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De Jan Karski à Michel Platini, Laurent Poitrenaux relève assurément tous les défis athlétiques que le plateau lui impose, même à cette table de lecture nonchalante à laquelle Mohamed El Khatib l’a convié aux côtés d’Anne Brochet, le temps d’une soirée au Théâtre de la ville (Espace Cardin) le 9 octobre dernier. Premier rendez-vous trimestriel proposé par l’artiste associé, la soirée a permis de redécouvrir, sans dispositif chichiteux, cet entretien incongru de décembre 1987 entre le footballeur et Marguerite Duras. Loin d’entériner la modestie du sportif, qui affirmait après coup n’avoir à peu près rien compris aux questions de la romancière, la discussion se révèle peu anecdotique car la philosophie du football s’y fabrique à deux voix, même si elle butte parfois contre l’épaisseur métaphorique et tragique que Duras lui inflige. Dommage que la lectrice, qui semble découvrir son texte et donne à son personnage, peut-être involontairement, une humeur souvent condescendante, ne fasse pas résonner ce partage du sensible et bloque le processus de signification, alors qu’une telle interview, à l’image du sport que conceptualise Platini, se joue sans loi du « plus fort » et sans « aucune vérité. »