Petite histoire de la création

Open House

(c) Clara Le Picard

Artiste protéiforme, Clara Le Picard était en résidence cette année à la Ménagerie de verre où elle s’est adjoint les services de Claire Astier, passée par l’Ecole du MAGASIN de Grenoble et connue notamment pour son travail à La Friche la Belle de Mai de Marseille. Ensemble, et pour célébrer les trente-cinq ans de la Ménagerie de verre, elles ont choisi de s’interroger sur les maisons de création qu’elles opposent aux maisons de production que sont les lieux de spectacles classiques, et sur ce qu’elles représentent pour les artistes et pour le public.

Pour se faire, Claire Astier est en scène dans ce qui démarre comme une conférence qui met en parallèle la Ménagerie de verre et la Factory d’Andy Warhol. Dans la salle ce soir-là, personne n’a fréquenté la Factory et la plupart du public n’était même pas né quand elle a fermé ses portes. Pourtant, nous la connaissons tous. Pour Clara Le Picard et Claire Astier, deux éléments se télescopent : pour les artistes, l’émulation artistique créée par le collectif qui marque ; pour le public, le mythe.

En présentant sur scène deux duos, l’un de musiciens, l’autre de danseurs, symbolisant les artistes des deux lieux susmentionnés, les deux femmes rappellent que même à distance, y compris temporelle, le travail des uns alimente celui des autres et que c’est la porosité entre les résidents qui crée l’émulation et l’atmosphère propres aux maisons de création. Plus encore, c’est cet effet de collectif qui traverse les époques qui fait la maison de création et crée aussi son aura. Car l’aura des maisons de création est au moins aussi importante pour le public que pour les artistes. En se rendant à la Ménagerie de verre, le public, comme celui qui se rendait à la Factory, a le sentiment de participer à son échelle à la création, au lieu en train de se faire. Le frisson pour le public est double : celui de se retrouver dans un lieu qui a vu la naissance d’artistes reconnus ou de spectacles emblématiques (là-bas, le Velvet Underground ; ici, Vincent Macaigne ou Claude Régy), et celui de voir un spectacle qui pourrait entrer dans la légende du lieu.

« Open House » confronte deux collectifs, le public et les artistes, qui se nourrissent les uns des autres en formant un supra-collectif humain. C’est une grand-messe où les deux entités communient avec intelligence et une grande joie.