BrookeDiDonato, Blending In © DR

Il y a une forme d’expression privilégiée de l’immanence dans les fleurs. Pure révélation et refuge, qui oserait se dire insensible à leurs odeurs, leurs couleurs, leur grâce – même leurs espèces ont souvent ce charme incantatoire qui semble fait pour laisser leur nom à un baiser.

En art, les fleurs sont devenues une idée fixe et un motif d’ambivalence jamais résolu. Elles ont été un lieu commun de l’art naturaliste chez les Flamands, puis un point de passage vers l’abstraction avec Monet. On les a aimées aussi en objet du désir au bord de l’obscénité chez Mappelthorpe, ou plus récemment en objet diplomatique chez Taryn Simon. L’exposition actuellement au Purgatoire, rue de Paradis, vous avance sur le même chemin, offre un riche panorama qui n’oublie pas Granville, Gallé ou Boubat, jusqu’à une excitante scène contemporaine qui continue de tester l’élasticité du motif (Ori Gersht, Brooke DiDonato, Henk Wildschut, David Shermann…).

Les curatrices, Muriel Fagnoni et Julia Gai, rappellent avec beaucoup d’esprit et de délicatesse que le cœur véritable de l’histoire de l’art bat de ces passions privées devenues une invitation à supporter le monde. Avec elles, les fleurs continuent d’incarner et transgresser toute valeur – de la plus consensuellement romantique à la plus révolutionnaire puisqu’elles restent virginales et vénéneuses par essence. Coupée de la nature, artificiellement recomposée en bouquet, la fleur est tout à la fois une figure d’arrachement et d’unité. Sens contre sens, il n’y a plus rien à résoudre, « l’utopie [est] là sous toutes ses formes, sous sa forme belliqueuse […] et sous sa forme innocente ».

Au Purgatoire, du 15 juin au 14 juillet, vous trouverez les meilleures raisons du monde de devenir monomane. Les fleurs sont tout et partout, à voir et à manger, à réfléchir, à peindre – à tous, puisqu’elles sont aussi à vendre. Visez les Floral Sundays pour profiter des brunch floraux, conférences d’histoire de l’art et ateliers créatifs.