Malgré les apparences, tout semble tourner trop rond au royaume du Danemark. Le metteur en scène, Oscar Gómez Mata, que l’on a déjà vu poète et défricheur des possibilités du plateau, continue son exploration des scénari de Lars Von Trier et présente cette nouvelle adaptation de l’unique série télé du réalisateur à la Comédie de Genève. Nous voilà donc coincés, au milieu des nineties, quelque part entre  « Urgences » et « X files » , le plaisir coupable du visionnage en moins. Difficile en effet de se raccrocher à une branche tant toute l’architecture de ce projet semble, elle aussi, errer dans les limbes du théâtre. Les acteurs tentent de surnager dans un marais d’humour qui n’en a que le nom, pataugeant dans les codes des séries B, venant chercher le public en multipliant les adresses inutiles voire gênantes. Le méta théâtre est à manier avec dextérité. Le fil dramaturgique se noie dans une série de non-effets, brouillés par des costumes kitsch et par une scénographie mobile qui ne cherche même plus à créer une image. Certes, l’esthétique et la pensée ne sont pas le seul chemin ontologiquement dramatique et l’on observe d’ailleurs depuis plusieurs saisons fleurir sur nos scènes une revendication du « moche », du « laid », du « creux » comme un témoignage de l’époque, mais l’accumulation de facilités laisse à distance et finit même par déclencher la fuite. Au-delà de ces considérations techniques – après tout, il y a des spectacles ratés bien plus marquants que certains plus maîtrisés- , ce qui trouble peut-être le plus, c’est l’opacité des intentions et la raison ultime de cette prise d’otage ; à quelle fête grotesque sommes nous conviés ? Le théâtre est un médium puissant, une arme capable de mettre en mouvement et lorsqu’on convoque un public, son temps, son argent, ses émotions et sa pensée, il est important de le respecter. « Il va y avoir du théâtre, du spectacle! » éructe un des personnages vêtu en robe maçonnique ; ça aurait pu être une idée à creuser.