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Si le T-shirt jaune porté sur l’affiche laissait craindre une prolongation des récentes chroniques, un peu légères, proférées sur France Inter à propos d’un certain mouvement social, le nouveau spectacle de Sophia Aram préfère un humour féministe plus éculé. Il faut dire que le premier sketch, consacré à l’eau de rose fétide des contes de fées, est moins mordant que le Petit Poucet de Foresti (Mother Fucker) et la parodie musicale disneylandesque qui l’achève n’est pas aussi aboutie que la Blanche Neige de Nadia Roz. L’humoriste fait heureusement oublier ses consœurs lorsqu’elle aborde les menstruations, citant autant les philosophes antiques que les métaphores populaires. Elle inaugure alors une série de sketchs très réussis sur le sexisme linguistique où la pertinence de l’écriture (due également à son complice Benoit Cambillard) s’allie à un art du travestissement très convaincant (de l’enseignante prout prout et décomplexée à la chercheuse moustachue de l’EHESS).

L’utopie dans laquelle les hommes auraient leurs règles et où les femmes méconnaîtraient (elles-aussi) le point sensible de leur partenaire masculin constitue l’une des trouvailles fortes du spectacles. Le pouvoir destructeur des mots, qui précède à bien des égards selon Sophia Aram celui des actes, donne à sa dramaturgie une vraie signification, au-delà de l’apparent collectage thématique imposé par le genre. La chanson finale, hymne jovial aux “fucking periods” qui auraient déclenché depuis l’Antiquité tempêtes et assauts, sonne comme un acte de libération linguistique simple et efficace.  Nul doute qu’en bonifiant le sketch initial, Sophia Aram signera un one woman féministe qui comptera dans l’humour populaire, toujours plein d’amour mais loin des ronronnantes oiseleuses regrettées par Patrick Juvet.