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Approcher l’antre d’Augustin Rebetez c’est d’abord pénétrer une cosmogonie esthétique très marquée. Un monde âpre, où les images sorties de cauchemars ou de d’hallucinations sous substances se confrontent dans des installations mystérieuses. Dissonante sans cesser d’être organique, son œuvre interpelle alors même que l’harmonie intrinsèque s’impose comme une évidence aux spectateurs. Accordant liberté et rigueur dans la réalisation, le plasticien metteur en scène mêle sans autre discours des images documentaires triturées, des créations vidéo version Youtubeur pré-pubère à une mise en scène sans gêne, sans code, sans référent immédiat, fabriquant masques, appareillage composite en scotch, sculptures cactées et lactées, machines à la Tinguely aromatisées au gingembre…, et frappe l’ensemble de la scène de son emblème, le désormais identifiable triangle noir tête en bas qui apparaît dans son parcours comme un leitmotiv. Pour assaisonner ce sandwich, le performeur musicien et contorsionniste finlandais Niklas Blomberg s’en donne à cœur joie dans l’outrance, malaxant à l’extrême sa chair comme sa voix dans une puissante libération exutoire. Spectacle pensé pour les adolescents, c’est une oeuvre complexe dans sa construction mais reçue par tous de manière simplement frontale : on rit de malaise ou de surprise, on refuse de regarder, on est écœuré puis soudain touché profondément par cet énergumène, proche d’une incarnation de l’art brut sur (longues) pattes. Le travail du son – précis, appuyé et drôle dans ses effets de répétition – sert de fil dramaturgique pour cette fable apocalyptique sans récit apparent qui laisse ainsi chacun raccorder – ou pas – les wagons. Un espace de transgressions et de divagations indisciplinaires qui bouscule.