Un ton au-dessus… Mozart !

Quatuor à Corps pour Mozart

© Jean-Claude Carbonne

Emilie Lalande a quitté les rôles titres des créations d’Angelin Preljocaj pour se consacrer à sa compagnie (1)Promptu et aux spectacles jeune public dont elle vivifie le genre. Elle y apporte une vraie dimension didactique qui fait de son « Quatuor à corps pour Mozart » un outil pédagogique intelligent et précieux pour les enseignants, une pièce mettant brillamment en scène les processus artistiques de création, et un délicieux moment de danse.

Emilie Lalande, désormais artiste associée du Ballet Preljocaj jusqu’en 2021, creuse avec malice et humour ce rapport musique/danse qu’elle aime tant et qu’elle a choisi d’éclairer dans le cadre particulier de la création jeune public. Le cinquième opus de sa compagnie met en lumière le panthéon des œuvres musicales d’un jeune prodige… Wolfgang Amadeus Mozart. En format scope, elle nous fait entrer dans son univers par un amusant ballet de pieds en chaussettes noires. Connaissant le goût affirmé du célèbre compositeur autrichien et de la chorégraphe aixoise pour une double lecture des œuvres, nous y percevons également l’image d’un clavier de piano sur lequel Wolfgang aurait, notamment, composé cette Symphonie n° 25. C’est sur ces effets miroirs qui se répondent que se fonde ce spectacle. Derrière une apparente simplicité se cachent maints imprévus, clins d’œil et niveaux de lecture.

Une narratrice, comme dans « Pierre et le Loup » – exquise Alizée Lalande – mène la danse sous les traits d’une « précieuse » aussi pédante qu’une mondaine de l’époque et espiègle qu’une enfant singeant une grande dame. « Quatuor à corps pour Mozart » est une sorte de tableau mathématique à entrées multiples. Il met en corrélation les notes, les couleurs primaires, les instruments, les mouvements corporels, certains airs connus de Mozart, la physicalité des interprètes pour nous donner à voir le fruit de ces combinaisons et les mécanismes qui ont fait naître ces compositions musicales, picturales, instrumentales, chorégraphiques. La danse est la traduction de la musique, le mouvement est la couleur du son. Ce qui donne lieu à des duos sensibles et émouvants comme celui du « Lacrimosa » ou le mouvement d’ensemble de « La Flûte enchantée » où la jeune chorégraphe et l’élément qu’elle incarne, la voix, sont portés au firmament par ses excellents interprètes (mention à Jean-Charles Jousni).

Emilie Lalande pense la danse comme un jeu spontané et l’enfant spectateur comme un « spect-acteur » qu’elle fait entrer en scène au fil de son récit après s’être au préalable approprié son vocabulaire imaginaire qu’elle enrichit de son effervescence poétique. C’est pétillant, vif, agile, imaginatif, ludique… : comme dans « Les Polyphonies » de Paul Klee, couleur et musique sont, ici, au diapason, et s’accordent au geste avec délicatesse.