Brouillon de culture

Les Idiots

Les Idiots

Les Idiots – (c) Christophe Raynaud de Lage / Festival d’Avignon

Attendue avec impatience et fébrilité, l’adaptation théâtrale du film « Les Idiots », de Lars von Trier, par Kirill Serebrennikov déçoit rapidement. Cette pièce, la première donnée en 2012 pour son arrivée à la direction du Centre Gogol de Moscou, est présentée comme son manifeste théâtral, adapté de la règle du Dogme95 dont Lars von Trier est l’un des fondateurs. Il s’agit alors d’ébranler les formes figées et de rechercher une nouvelle unité théâtrale au service d’une plus grande vérité. Tout ce qui a lieu sur le plateau de théâtre est hic et nunc. L’idiot est la première figure choisie, emblématique de cette quête. Mais aussi sujet politique par excellence – il ne faut pas oublier qu’à l’époque de l’Union soviétique on enfermait les opposants dans les hôpitaux psychiatriques. La recherche de vérité est aussi la quête inhérente au métier d’acteur. La pièce commence dans la salle d’un tribunal en Russie, l’accusé nie connaître la teneur des faits qui lui sont reprochés, et la cour se charge donc de les lui rappeler. Enchaînements de tableaux où sont montrées du doigt tour à tour la corruption, l’homophobie, la suprématie du Kremlin, etc. Les moyens théâtraux employés pour dénoncer le système politique qui gangrène la société russe contemporaine restent gentillets. Il est aussi rapidement difficile de suivre la ligne directrice des propos. La dramaturgie stagne à l’état de brouillon. L’ensemble est pétri de bonnes intentions mais sans qu’aucune d’elles soit exploitée pleinement. De plus, la référence à « Dogville », autre film de Lars von Trier, pour une partie de la scénographie est à gros sabots. L’un d’entre eux dit : « Je voudrais comprendre ce que je fais ici. » Eh bien, nous aussi ! Dubitative, je m’éclipse.