Joliment décevant

Cuando vuelva a casa voy a ser otro

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« Quand je rentrerai à la maison, je serai un autre. » Un chassé-croisé de vies incertaines, d’errances, de nostalgies révolutionnaires dans un pays hanté par la crise économique. Une jeunesse argentine qui se cherche dans l’art, dans l’amour, dans la politique. Un passé recomposé se mêle à un présent sans perspective. Le point fort de ce spectacle est sans nul doute la scénographie : deux tapis roulants sur lesquels les personnages évoluent, s’aiment, se perdent, choisissent ou subissent leur solitude dans un harmonieux effet de fondu enchaîné provoqué par cet ingénieux dispositif. On pense un peu à Robert Lepage et à Joël Pommerat. Pensotti revisite les mythes familiaux, la manière dont le cerveau humain recompose le passé et tord le présent. Quelle part de notre histoire familiale portons-nous ? Qu’est-ce qui nous influence ? Peut-on devenir un autre ? Ces personnages toujours à la recherche d’une version meilleure d’eux-mêmes peinent à échapper à leurs conditionnements.

Le thème est ambitieux, et même si ce spectacle comporte une grâce certaine on reste un peu déçu par la pauvreté du texte et le caractère artificiel des situations. Tout cela est aggravé par le choix d’un panneau lumineux à ampoules rouges nous expliquant, entre autres, les états d’âme des personnages au cas où nous ne les aurions pas devinés : « Damian est déprimé. Il ne sait que faire. Il se sent seul. » Le charme qui pouvait émaner de l’inachevé de la mise en scène et de ces histoires décousues tombe à l’eau par ce trop-plein d’informations inutiles et psychologisantes.

On reste finalement assez extérieur, s’en fichant un peu de savoir si Natalia va devenir la grande chanteuse qu’elle rêvait d’être et si Damian va au bout du compte sortir de cette mauvaise passe. Ce spectacle nous frustre par son potentiel immense et le ratage de son aboutissement. Il reste un joli sentiment de mélancolie et l’envie d’en voir plus.