L’attendu popcorn time

Marche

© DR

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Cette année, au Festival d’Avignon, les compagnies semblent touchées par la même pathologie : la « pathologie de Monde ». Et ces compagnies malades montent inlassablement le même spectacle moribond, impuissant, aphasique. Puisque « le Monde » va mal, comment les hommes pourraient-ils parler de chatons, d’arcs-en-ciel et de licornes ? J’assiste donc, sans surprise, à l’éternel retour du même, quand je découvre « Marche » dans la cour du musée Angladon, dans une mise en scène de Christian Petr.

Un plateau circulaire et central figure mimétiquement un monde à la dérive cerné par des abîmes. Ou dans des termes plus prosaïques, la rue, entre catwalk mondain et promontoire des invisibles. Les comédiens sur scène font la chronique chorale d’un de ces invisibles, qui « installe chaque jour sa statue mouvante au fond du caniveau ». Un homme marmoréen, qui ne s’anime que sous des yeux nyctalopes.

Cette jolie promesse allégorique n’est pas ce que j’ai vu, elle est le fruit de ma tendance romantique à attraper au vol la poésie du Monde (ici, c’est la pathologie du Bisounours qui agit). Ce que j’ai vu était laid. Un Monsieur Loyal à la jaquette élimée, une gourgandine de cabaret en collants H&M. La toile de jute qui habille les rampes n’ajoute aucune douceur à ce spectacle, nerveux, à la lisière de la folie, qui veut tout et ne propose rien. Et puis, la faute aux cigales, il faut dire que la moitié du texte n’arrive pas à mes oreilles.

Alors, quand on nous annonce que cette « prise d’otages » va se poursuivre avec un second spectacle, c’est l’amour du OFF qui ne me fait pas bondir de mon siège. La troupe formée par l’équipe d’Emmaüs Pointe-Rouge à Marseille entre en scène, fanfaronne, puis réalise qu’elle tourne en rond : c’est enfin l’heure de mon pop-corn time. Et ce décor improbable me semble beaucoup moins laid, quand on joue avec et que l’on rit, même si le Monde va mal.