© Julien Benhamou

© Julien Benhamou

Je pourrais vous parler longtemps de l’intérêt de la mise en scène de Damanio Michieletto. L’art du détail y est absolument bluffant. Le sens du livret est habilement remotivé par certains choix assumés. À titre d’exemple, la discréditation (du Comte Almaviva) par ses opposants prend des airs de critique des déviances de la presse ; et ce de manière suffisamment fine pour éviter d’empiéter sur la logique et le plaisir propres de l’œuvre.

Je pourrais vous narrer la beauté et la richesse du décor. Le mélange entre extérieur (la rue, l’espace populaire) et l’intérieur (où se trouve, étouffée, Rosina) est parfaitement rendu par cette maison qui, pivotant sur elle-même, multiplie les perspectives dramaturgiques. Le travail technique sur le décor (Paolo Fantin) et les lumières (Fabio Barettin) est tout simplement grandiose.

Je pourrais m’étendre sur les qualités vocales des interprètes. Le couple Lawrence Brownlee (Comte Almaviva) et Pretty Yende (Rosina) mêle technicité et justesse émotionnelle avec brio. Alessio Arduini est irrésistible en Figaro, avec sa voix chaude et franche.

Je vais plutôt vous décrire mon enthousiasme pour le talent d’acteurs de l’ensemble des comédiens lyriques. Voilà une mise en scène où chaque comédien est à la fois chanteur – certes – mais aussi acteur. Chacun vit son texte et le transmet dans sa dimension musicale ainsi que théâtrale, et ce, sans discontinuer. Voilà du théâtre lyrique, voilà une performance digne de l’essence de l’opéra : jouer en chantant. Si seulement toutes les œuvres lyriques pouvaient être interprétées avec la même envie de mêler théâtre et chant, nous ne pourrions être plus comblés. Il est à espérer que l’on puisse retrouver sur les scènes musicales un travail du même niveau, qui met autant en avant ce lien entre performance vocale et vécu physique du texte, avec vérité et simplicité.