C’est quoi ce machin ?

+51 Aviación, San Borja

© Yuta Fukitsuka

© Yuta Fukitsuka

Jouer au T2G « +51 Aviación, San Borja », de Yudai Kamisato, l’un des auteurs-metteurs en scène les plus doués de leur génération (plus jeune metteur en scène à remporter le premier prix du Toga Directors Competition pour sa pièce « Desire Caught by the Tail »), constituait un pari qui a malheureusement été perdu.

En cause, très certainement la difficulté pour un Occidental de saisir les nuances d’un discours en japonais, car les Japonais présents ont eux adoré le texte et la diction manifestement surprenante. En réalité, Kamisato a écrit et mis en scène une pièce apparemment loufoque (le récit historique d’une famille de Japonais émigrée au Pérou, où notamment le père du théâtre mexicain est convoqué en catcheur) mais qui traite des Japonais pour les Japonais. Et la lecture – en surtitrage beaucoup trop rapide – ne permet pas de pénétrer dans cet univers.

Quant à la mise en scène, elle reste trop simpliste pour susciter autre chose que l’ennui : les valises symbolisent le voyage ; les tremblements des acteurs imitent les trajets en train, avion ou bus ; une console de jeux illustre la modernité du Japon et la chaîne NHK en arrière-fond sonore est censée donner corps au récit que déclame sans pause l’acteur principal, selon lequel les Japonais en exil écoutent NHK en continu… Le seul moment réussi est l’arrivée au Pérou : la transformation d’un Japonais en Péruvien est assez drôle, avec une musique entraînante qui laisse espérer un mouvement, un décollage. Fausse alerte, le récit reprend, monocorde, sans rythme, sans brisure.

Vers la fin de la pièce, l’un des acteurs de la pièce s’interroge : c’est quoi ce machin ? On ne peut alors s’empêcher d’appliquer cette question à cette sorte de Beckett japonais, l’absurde semblant présent mais compréhensible par les seuls Japonais. Pour les autres spectateurs, une seule question demeure : c’est quoi ce machin ?