De l’or en pages

Braise et cendres

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Blaise Pascal affirmait que tous nos malheurs venaient du fait que nous étions incapables de rester seuls un quart d’heure dans notre chambre. Cendrars fut-il plus malheureux qu’un autre ? Bien malin qui répondra à cette question ! Ce qui est sûr, c’est que « le plus impatient de tous les hommes » fit du monde sa chambre. Et qu’il rêva sa vie dans les hôtels plus souvent qu’à son tour. Car Cendrars rêva sa vie. Grand voyageur certes, mais aussi grand fabulateur ! Et le premier à le reconnaître : « Qu’importe si j’ai vraiment pris le Transsibérien, puisque j’ai réussi à vous y emmener avec moi ! »

Pas question pour ce Suisse de mener une existence réglée comme une mécanique d’horlogerie ! La Russie, la Chine, le Brésil, l’Afrique, la Californie, New York… et à une époque qui ne connaissait ni tour-operators ni compagnies low cost !

« Ah ! les voyages. Aux rythmes incertains, aux rivages lointains, que c’est beau, les voyages… » chantait Barbara à ses débuts. Rythmes incertains, rivages lointains : l’auteur de « L’Or » connut tout cela. Mais s’il parcourut la terre entière, ce ne fut certainement pas pour la beauté du paysage, mais bien pour se perdre et se retrouver. Et comme l’homme avait encore plus de talent qu’il avait la bougeotte, l’émotion et la fulgurance sont au rendez-vous. Jacques Nichet a choisi 30 pages dans une œuvre qui en compte quelques milliers. Et il a bien choisi. Comme il a vu juste en les confiant à Charlie Nelson. Ce n’est pas rien, Charlie Nelson ! Il déboule pieds nus du fond de la salle et vous emporte dans ce torrent de poésie. À le voir et à l’entendre, on se dit que Cendrars, contrairement à ce qu’il croyait, ne s’est pas « agité inutilement ».