©Elisabeth Woronoff

©Elisabeth Woronoff

Entre témoignages vidéos, chant lyrique, monologues et quatuor à cordes, Fabrice Murgia dans sa mise en scène de “Children of Nowhere” rend la parole aux victimes du camp de prisonniers de Chacabuco, dissimulé dans le désert chilien, sous la dictature de Pinochet. Le documentaire se retrouve ici dans le théâtre sous sa forme poétique dans une mise en scène esthétique et quasiment hypnotique, qui alterne entre monologues vibrants de Viviane de Myunck, seule sur scène, et témoignages humains et pudiques d’anciens prisonniers, à l’écran.

Cette succession de paroles qui se répondent est ponctuée de chant lyrique et transportée par les violoncelles de telle manière que la souffrance est restituée non pas dans ce qu’elle a d’horrible mais dans ce qu’elle a d’humain et de fragile. L’angle choisi n’est pas de bouleverser par la violence des propos mais de réparer en montrant par quelle force les hommes face au désespoir se sont unis contre la barbarie. Comme le dit un rescapé, une des premières choses qu’ils ont créées dans le camp, c’est un théâtre, ce qui leur semblait indispensable pour ne pas sombrer dans le néant et résister à la perte d’identité. Cette mise en scène contemplative redonne alors vie aux non-dits, aux idéaux enfouis et aux fantômes d’antan, permettant une réelle prise de conscience politique.