Intimes fragments

La Tête des porcs contre l’enclos

© C. Ablain

© C. Ablain

Derrière le titre étrange de la pièce se trouvent un propos et une forme tout aussi curieux. La Cie In Vitro propose une plongée dans l’intime, inscrite dans un texte compact, épuré, qui transmet avec un goût affirmé du mot juste une violence physique traumatique, à la frontière entre rêve et réel.

L’avancée dans cet univers clos du corps et de l’esprit se fait par une suite d’épisodes enchaînés avec fluidité. Délimités à la fois par la projection du nom des pièces d’une maison – construisant un espace imaginaire –, ils le sont aussi par le découpage propre au texte – qui recense plusieurs « impacts » dans le temps. Cette progression semble pousser encore plus loin les retranchements de cette intimité où se nidifient voix, corps, peinture et musique. Ainsi rythmée par cet entremêlement plastique, la pièce déroule un vécu – réel ou fantasmé – qui s’articule de façon organique. Fantastiques beautés du corps du danseur Lucien Reynes ; du grain vocal de Marine Mane ; des productions live de Vincent Fortemps (dessins et peinture) et Christophe Ruetsch (musique).

La performance est exigeante et, pour être réussie, n’admet aucune fausse note. Les quatre artistes accomplissent brillamment cette partition à huit mains, construisant avec finesse une mise en scène léchée mais vibrant d’une émotion très humaine. La pièce recèle de précieuses idées scéniques qui se déploient comme par flux et reflux – à la manière des vagues constamment redessinées sur le mur. En faisant vibrer la corde sensible d’un lyrisme très personnel, Marine Mane réussit à toucher le spectateur au plus profond de son propre être.