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Quel défi que de monter « Polyeucte », une des pièces les plus difficiles d’accès de Corneille, cette tragédie de l’amour et de la religion, devant un public parisien volontiers ricaneur. Et les ricaneurs n’ont pas manqué de ricaner dans la salle des Abbesses du Théâtre de la Ville.

Est-ce la faute des costumes ? Loin d’imaginer que « Polyeucte » se monte exclusivement en toge, on reste cependant un peu désarçonnés par des costumes qui n’ancrent pas la mise en scène dans une époque donnée. Les costumes de ville ternes de petits contrôleurs des impôts voisinent les blousons de cuir sans qu’on arrive précisément à savoir si la pièce se passe de nos jours ou dans les années 1950. La faute des acteurs, alors ? Pas vraiment non plus. On les sent qui font de leur mieux, malgré des percées de cabotinage qui déclenchent les rires discrets de la salle.

Mais alors, qu’est-ce qui fait que la mayonnaise ne prend pas ? Difficile à dire. Le spectacle est propre, et c’est probablement ce qui fait qu’on s’y ennuie poliment. Rien ne dépasse, tout y est lisse, à peine sent-on la passion amoureuse de Sévère et Pauline, ou le fanatisme religieux de Polyeucte. Il y en aurait pourtant eu, des choses à dire, à faire, en termes de fanatisme religieux, de nos jours. Mais non. Rien. Les acteurs s’ébattent joyeusement dans une jolie scénographie. Ajoutons à cela la musicalité des vers de Corneille qui a tôt fait de bercer un spectateur un peu endormi, et ce fameux spectateur reste à la porte de la pièce.