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Dans le cadre du festival Faits d’Hiver, le chorégraphe québécois Daniel Léveillé propose sa dernière création, inaugurée à TransAmériques l’année dernière, et qui fait directement suite à son « Solitudes solo ». Il poursuit un travail exigeant sur la représentation chorégraphique de la chair et du désir.

Ici, six tableaux d’une douzaine de minutes chacun, explorant plusieurs configurations de couples. Pas de concession au suave et au liquide : on est en présence de corps massifs, de mouvements bruts, de séquences successivement bouclées et discontinues. Les corps s’aimantent plus qu’ils ne s’unissent, et l’on assiste davantage à une sorte de lutte gréco-romaine entre deux forces contradictoires qui s’avouent, tour à tour, vaincues ou victorieuses…

La musique joue un rôle essentiel, parfois à la limite de l’envahissement, qu’il s’agisse de thèmes baroques ou de morceaux pop (en l’occurrence, « When the music’s over » des Doors et « I want you » des Beatles, qui ont en commun d’être des épopées sonores tenant de l’incantation magique). A la différence des choix scénographiques (plateau vide, corps presque nus et lumière minimaliste), le son sature l’espace de la représentation.

On aura été séduit par la justesse de ce que racontent les danseurs : sans tricherie ni détournement, chaque épisode dit quelque chose des relations tissées entre les êtres, de la découverte de l’autre, de l’abandon… C’est aussi toute la limite de l’exercice, car en partant d’un matériau dépouillé et neutre, Léveillé convoque approximations et tremblements. Les corps sont abordés avec un langage (paradoxalement) à la fois plus mécanique et plus maladroit. Mais c’est ce qui décuple aussi l’intensité fascinante du projet et sa belle narration expressive du désir.