La mort nous va si bien

Je suis contre la mort

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La vie comme salle d’attente d’aéroport ? La métaphore est usée et peut vite sombrer dans le kitsch métaphysique. Mais les comédiens du Théâtre du Menteur évitent le piège avec un spectacle musical rythmé et qui touche juste.

Ils sont quatre et attendent le décollage du vol de la compagnie Air Sky pour une destination inconnue. Alternant séquences déclamées et chansons-slams sur fond de musique live et de loops électroniques, ils font part de leurs interrogations et de leur désir de joie face à l’absurdité de l’existence. Ponctuée par le gimmick des annonces d’aéroport au haut-parleur, la performance s’appuie sur le texte percutant de François Chaffin, qui montre qu’être « contre » la mort, ce n’est pas simplement s’y opposer par une démarche vitaliste, mais aussi apprendre à vivre dans sa proximité.

La dialectique importe peu ici. Ce qui compte, c’est l’exorcisme par la parole : l’énonciation des peurs, jusqu’aux plus ridicules (« L’anatidaephobie est la peur qu’un canard vous regarde droit dans les yeux » !), fidèle au vers sublime de René Daumal : « Nomme si tu peux ton ombre, ta peur / et montre-lui le tour de sa tête ». Sobres, précis, les comédiens excellent à présenter la juxtaposition des vérités tâtonnantes et les stratagèmes que l’on utilise pour résister à l’angoisse du vide. Parfois casse-gueule, les parties chantées reposent sur des textes malins et mordants.

« Pourquoi ne pas foncer, hein, aller sans élastique, pourquoi ne pas sentir que c’est la bonne, la seule, la vie, la tienne, ta vie, pourquoi ? » : la prise de conscience est banale, mais on ne la répétera jamais assez.