Obscurité qui restitue

Quello che di piu grande l'uomo ha realizzato sulla terra

Silvia Costa

Je n’ai pu m’empêcher d’appréhender ce travail comme un faux diptyque, une réponse de la Lumière suspendue, une émancipation. L’aveugle de la nouvelle de Carver, les yeux bandés de l’homme envahi par sa non-vie, l’autel mystique qui se révèle à contre-jour, tout sur le plateau nous plonge dans ces yeux qui ne distinguent plus par manque d’espace mental disponible. Les brèches, les trous, les cassures, les cicatrices sont les tuyaux privilégiés pour laisser jaillir la lumière. Exercice delphique : les paumes contre le mur jusqu’à ce que l’Idée vienne, détruire enfin le cadre et redevenir poussière dans l’infini pour vivre, ensemble, l’image-son finale comme une eucharistie.

“Quello che di piu grande l’uomo ha realizzato sulla terra” est une fable, un kaddish pour l’enfant qui ne naîtra plus (l’eau placentaire qui noie puis le sang et la terre) et pour le couple, condamné aux souvenirs gris mais parfumés d’une amertume délicate. La tristesse comme béquille, tout reste à advenir et c’est bien là la force et la candeur de cette jeunesse en scène si sensible et paradoxalement hors du temps.

A propos de l’acte créatif, Claudia Castellucci affirme, aux antipodes des discours démagogiques ambiants, “qu’imaginer un spectateur c’est voir devant soi ce qu’il manque de moi ; c’est fausser un échange parce que créer de cette façon signifie combler.” On pourra apprécier à quel point sa disciple Silvia Costa assume cette ligne en creux et prouve que son désir est parfaitement et tragiquement suffisant pour prendre la parole, la scène et l’émotion de ceux qui la regardent.