© E. Carecchio

© E. Carecchio

Du récit de la mort de Simon naît l’inexorable vie.

D’abord, celle qui se cache dans les vagues sensorielles du texte dont le flux et le reflux lèchent l’âme du spectateur. Depuis l’adrénaline des surfeurs plongés dans le remous des vagues de l’océan, jusqu’à celle qui coule dans les veines du personnel hospitalier, la pièce est un incessant magma empiriste. Le rythme et la saveur des mots, portés par l’articulation très juste de Vincent Dissez, tissent des tableaux mouvants et sensibles, où l’on se trouve happés, avec délice et angoisse.

Cette force du texte s’ancre dans une mise en scène efficace. Sylvain Maurice maîtrise astucieusement l’effervescence du discours en faisant usage d’un décor qui concentre l’action rapportée et réelle. Vincent Dissez parcourt de long en large un tapis roulant, traçant une dynamique qui dépasse le seul cadre physique de la scène. Placé au-dessus de lui, Joachim Latarjet l’environne d’un univers musical soigné. Guitare, clavier numérique, trombone et voix ponctuent la pièce avec une très grande justesse.

C’est aussi par la force de ses seuls gestes et la modulation de sa voix que Vincent Dissez fait jaillir la vie, ou plutôt les vies ; celles des personnages liés, d’une manière ou d’une autre, à Simon. L’acteur endosse tour à tour le masque des différents médecins, des parents, de la receveuse du cœur du jeune adolescent… Cette foule passe naturellement à travers son gosier et chacun dévoile un peu de son passé, de son être : la voix donne vie, l’acteur accouche de cette multitude invisible d’êtres.

L’œuvre agit comme une greffe. Le dispositif scénique original nous transporte immédiatement au cœur d’une matière dense, dont le rythme effréné est savamment calculé. L’ensemble donne l’impression d’une netteté de jeu presque trop propre ; mais le talent des artistes donne lieu de croire qu’une émotion encore plus forte puisse être trouvée et exprimée. Un jeu et un texte palpitants.