Bonbon qui broie le blues

Every Brilliant Thing

© Duncan Macmillan

La performance soliste de Duncan Macmillan se déploie comme on déplie un papier de bonbon froissé. Avec ce son délicieux et cette couleur un peu criarde qui annonce une gourmandise ravissant yeux et palais, tout en gardant un drôle d’arrière-goût acide.

Comment parler de la dépression, de cette bête qui noircit et ronge les pensées ? Comment parler du suicide, de ce départ brutal qui laisse une trace au fer rouge ? Face à ces couleurs terrifiantes, Duncan Macmillan choisit un chemin faussement détourné pour élargir la palette des émotions. L’artiste tente de renouer avec des moments de simplicité, de petits événements anodins qui ne présagent en rien le pire et laissent un goût de glace estivale. Avec ces choses qui jalonnent la vie et donnent envie de la vivre. L’humour anglais s’attaque aux sentiments d’une manière délicatement tragique, sans jamais se confronter directement au serrement de cœur lui-même, mais par le biais d’un fourmillement de sensations enrobées dans un ton appliqué et joyeux.

Le grand soin apporté au support sonore féconde intelligemment l’imagination et aide l’effet « madeleine de Proust » à se former. Sur le ton de la conversation, Duncan Macmillan rappelle les goûts, les sons, les chatoiements – notamment ceux de l’enfance. C’est un détournement de la mort à la vie, comme l’on remonte un fleuve, pour retrouver des joies simples mais vitales. Le spectacle déborde d’images, brode les anecdotes les unes avec les autres pour tisser une toile faite d’énergie insouciante et de bonne humeur, qui laisse d’autant mieux transparaître la profondeur insoupçonnée du discours.

Le spectacle a déjà gagné le cœur du public dans divers festivals, conquis par ce sourire qui parle de choses si difficiles avec une simple main tendue, un bonbon au creux de la paume, qui allège un peu le poids de la blessure. Il ne s’agit pas d’oublier, mais justement d’ouvrir avec tendresse un cœur à vif.