Tout, en effet, se répond, se traverse, se fait écho, dans la nouvelle création de Vincent Thomasset : le corps et le langage, le son et l’espace, les déstructurations et les agencements, les présences et les ombres.

Un tel degré d’analogies donne le tournis. Tout ensemble n’est pas confusion, se murmure-t-on afin de comprendre l’ennui qui nous saisit. Le puzzle oulipien, en comportant trop de pièces, décourage le spectateur. Thomasset dit avoir voulu explorer la façon dont les identités se construisent ensemble, par « voix multiples », par « traversées » : la naissance d’architectures mentales et physiques. A vouloir mêler tant de thèmes et de matériaux, il livre un spectacle intriguant par moments, souvent trop abstrait. “Ensemble Ensemble” a l’alibi du work-in-progress, de la création en kit : (heureusement que) le spectateur est là pour donner de la consistance à ce qu’il voit.

Sur scène, quatre interprètes, dont la présence est ce qu’il y a de plus convaincant, trois danseurs et une comédienne, échangent au sens propre, des paroles : des mots prononcés par l’un sortent de la bouche d’un autre. Parfois, ils dansent. Comme leurs discours, leurs mouvements sont souvent heurtés. Le clavecin d’une mélodie baroque vient marteler l’espace sonore, tandis que des jeux d’ombres suggèrent qu’on est jamais totalement celui que l’on croit. Que nous racontent ces présences dans la pénombre ? Un tout – celui du groupe comme du sujet particulier – qui ne “tient plus ensemble” ? Certains des textes sont issus des carnets intimes d’une femme née en 1910, trouvés par l’auteur dans un vide-grenier. Qu’apporte cet élément sous-exploité ? Le pêle-mêle, le pot-pourri hétéroclite se déguise sous un formalisme minimaliste. Spectacle mineur, c’est en le prenant comme tel qu’on peut lui trouver quelque poésie, en le délestant d’intentions trop lourdes, s’abandonnant à la familiarité d’êtres qui hésitent, balbutient, se disloquent.