Deux femmes remarquables

Soudain l'été dernier

© Thierry Depagne

Pour qui a vu le film de Mankiewicz, le pari de Stéphane Braunschweig pour sa première création en tant que directeur du théâtre de l’Odéon, « Soudain l’été dernier », était un vrai défi. Qu’il relève avec brio mais de façon un peu trop distancée. D’abord par la scénographie, une jungle touffue où les personnages semblent presque écrasés, minuscules, et qui va se modifier au fur et à mesure de l’action. Ensuite par la grâce des deux actrices absolument principales, Mrs Venable (Luce Mouchel), la mère farouche et fragile, et la jeune Catherine (Marie Rémond), tout aussi fragile mais sûre de son fait. C’est une lutte sans merci à laquelle on va assister entre ces deux femmes que tout oppose, la classe sociale et leur amour pour Sébastien, le poète, le fils et fiancé, mort soudain l’été dernier dans des circonstances non élucidées. Une scène que le film décrivait de façon effroyable, alors qu’ici seuls les mots comptent et que le mystère reste entier. Catherine, qui a assisté au drame, est-elle folle quand elle raconte ce qu’elle a vu ? Mrs Venable est-elle un monstre capable de la faire interner pour lui imposer le silence ? Même la famille de Catherine lui demande de changer sa version pour préserver une portion d’héritage. Elle est seule et personne ne la croit ou ne veut la croire. C’est alors qu’intervient le médecin-psychiatre, qui se propose de l’« opérer » à la demande de Mrs Venable mais souhaite d’abord la rencontrer. C’est le moment décisif du drame, le poids de l’homosexualité, impossible à admettre pour une mère qui se bloque dans son déni mais révélée à Catherine, qui a fait office sans le savoir de rabatteuse à Sébastien. Et c’est à peine suggéré.