© Pablo Muñoz

Dans un dispositif livré incomplet pour cette version pour la France présentée à Brest lors du Festival DañsFabrik, Maria Siebald occupe sa place habituelle dans le quadrilatère qui sert d’écrin à cette performance entièrement pensée pour un public mal entendant… D’origine chilienne, la performeuse et comédienne joue gros dans cette nouvelle version d’une proposition assez déroutante. Quelques écouteurs – pas assez et cela peu être préjudiciable pour la satisfaction du spectateur – sont posés devant ce tapis blanc sur lequel est installé un triptyque de la même couleur, légèrement réfléchissant mais pas au point de permettre un effet miroir. Au-dessus, un écran plasma qui reproduit « l’oscilloscope » des gestes de la danseuse à moins que ce ne soit celui de la musique que nous n’entendons pas, allez savoir. En tous les cas, la danseuse fait son apparition, casque aux oreilles. Elle entonne par gestes des chansons qui lui donnent le rythme de sa prose toute en mouvement. La question qui se pose et que posait Louis Jouvet à ses élèves du conservatoire : est-ce que cela passe la rampe ? Est-ce que cela touche le public ? Je pense que oui et ceci par la simple présence de Maria Siebald. Elle est prodigieuse, investie, engagée dans ce qu’elle tente, à savoir « rapprocher les malentendants de la musique ». Elle s’engage aussi dans une voie qui oblige les entendants à prendre pour ce qu’ils sont les signes de ses mains. Ils sont là pour traduire et communiquer à ceux qui n’entendent pas toutes les émotions d’un texte, d’une chanson, d’un spectacle… Parfois on est gêné d’être exclus puisque sans casque pour suivre la musique, alors que, majoritairement, nous ne maîtrisons pas la langue des signes. L’ensemble est beau, émouvant, poignant. Cela nous tire parfois les larmes aux yeux tellement l’interprète est engagée et cela se sent. On se laisse aller à penser ce que ce serait avec les quatre interprètes dans le dispositif complet. On pense aussi à l’émotion pour les sourds d’assister à leur premier concert comme l’a organisé Maria Siebald au Chili. Décidément, Transmisor est bien comme une radio qu’on regarde ou comme une télévision dont on aurait coupé le son. Un moment de pur abandon où l’on doit faire confiance aux gestes plus qu’aux artifices usuels d’un spectacle.