Trouble dans le genre et dans le cosmos avec Euripides Laskaris

Titans

(c) Elina Giounanli

Trouble dans le genre et dans le cosmos avec Euripides Laskaris, performer grec insolite qui offre un spectacle joyeusement chaotique : Titans. Le titre se réfère aux premiers temps du monde, d’avant une rationalité anesthésiante, où toutes les fantaisies étaient possibles avec les éléments. Si, au départ, l’installation laisse un brin dubitatif, avec l’éculée couverture de survie et quelques plaques de polystyrène, on tombe sous le charme de cette étrange chimère en gestation permanente d’idées, qui tient à la fois de la drag et du flamand rose queer amateur des Monty Python. Augmenté de prothèses, le performeur offre un spectacle où se mêlent inquiétante étrangeté et show burlesque, réagissant avec son environnement fait de bric et de broc. L’héritage de Bob Wilson, avec qui Euripides Laskaris a travaillé, est sensible à travers l’interaction avec les néons et la règle d’or bergsonnienne du rire comme « mécanique plaquée sur du vivant », et l’on songe aussi à Copi quand il repasse sa perruque, juché sur ses talons roses. Eloge du désordre et du kitsch, l’ensemble est néanmoins poétique, avec des images faites de presque-rien comme cet ange orthodoxe, auréolé d’or qui s’éloigne avant de partir dans un grand rire nietzschéen : l’étrange créature semble en effet prendre au mot l’invitation à danser et à faire danser le monde du philosophe allemand. Réjouissant.