L’art peut-il sauver le monde ? Question postmoderne par excellence, renouvelée ici sous la forme d’un workshop maïeutique par le performer irakien Enkidu Khaled. En petit nombre, assis en arc de cercle, les spectateurs sont confrontés à une méthode ludique pour aiguiser sa créativité – et travailler sur des projets de spectacle vivant. Le principe de base : penser à 4 mots provenant de souvenirs d’enfance, que l’on doit spontanément associer à un autre mot. C’est à partir des ces 4 nouveaux termes, regroupés en une phrase grammaticalement correcte quoique probablement absurde, que se construit le projet, étape par étape (on aura ainsi abouti, dans cette session-ci, à la proposition : “Barking buildings desire skiing”, qu’un spectateur volontaire se prête à dessiner sur une feuille de papier). Enkidu ne précise-t-il pas que son nom, dans la saga de Gilgamesh, signifie “raison d’agir” ? Voilà en tout cas une méthode qui, à défaut d’avoir un Pictionary ou un Time’s Up à portée de main, animera à coup sûr vos soirées. Mais “Working Method” aurait pu rester un atelier participatif gentillet si l’Irakien n’avait ajouté à sa proposition, en fil conducteur, un témoignage personnel sur sa vie d’artiste dans son pays… jusqu’à sa conclusion abrupte, violente, qui joue habilement sur la frontière entre réalité et fiction. Après une heure de titillage des neurones, on se prend un coup de poing dans les tripes. Habile et dérangeant.