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Puissante cette voix issue d’un trait de lumière dans l’obscurité noire. Puissante cette correspondance entre un détenu et un écrivain. Puissant ce destin qui conduit, de braquage en évasion, un homme à l’isolement pendant plus d’un an.

Insupportable cette atteinte aux droits de l’homme, prisons bouges crasseux et d’une étroitesse à vomir, insupportable cet enfermement inhumain, insupportable cette barbarie dont fait preuve notre société dans son rapport à la délinquance, insupportable de se dire que l’on est complice, tous, d’une telle destruction sans sens ni but. Insupportable surtout de constater depuis 50 ans que rien ne change. Rien.

Absurde cette école de la violence que sont nos prisons, absurde cette rampe de lancement vers une révolte autrement plus grave que quelques grammes d’un stupéfiant vendu à un fils de, vers un ailleurs terroriste qui semblera valoir mieux que cette lente destruction, absurde cette absence totale de réflexion sur le but et les fins d’un enfermement qui conduit à la promiscuité entre fauves et agneaux, à la séparation d’un monde qui va si vite, séparation subie et violence apprise qui, mieux que tout, enferment le prisonnier dans une prison devenue perpétuelle, incapacité à renouer avec un réel devenu étranger, incapable d’être en société.

Ce que nous montre François Cervantes est de l’ordre de l’indicible kafkaïen, mots posés nés du noir, mots sans affect et d’autant plus violents, diction parfaite pour raconter la descente à la dépersonnalisation, à la déchéance du corps aussi, à l’oubli, au sens premier, de toute humanité. Sa performance est parfaite en ceci qu’elle ne laisse aucune porte de sortie au spectateur. Même shooté par la musique monocorde des mots, attention dérivante du fait de l’absence totale de baroque d’un texte ciselé au cordeau, celui-ci verra son esprit au-delà du conscient, être envahi de cette histoire sans issue. Sans issue. Et sortira empli de nausée et avec la sensation d’avoir les mains sales. Sans personne pour rallumer la lumière.