In Perhappiness - cie Kitch Kong - (c) F.Rodor

(c) F.Rodor

Le Cirque Electrique accueille sous son chapiteau de la Porte des Lilas un spectacle original et décalé, « In Perhappiness », de la compagnie Kitch Kong. Mot-valise, inventé par le poète brésilien Paulo Leminsky, fait de perhaps et de happiness : le peut-être bonheur.

« In Perhappiness » : spectacle de cirque très théâtralisé pour trois interprètes, doux-amer et excentrique, qui souligne avec talent toute la fragilité du bonheur, but ultime que nous sommes pourtant tous assignés à poursuivre. Du cirque, il y en a donc, et du techniquement irréprochable. Un peu de main-à-main et des portés acrobatiques bien maîtrisés. Deux passages à la corde lisse tout à fait réussis, dont un, original et bondissant, du fait de l’emploi d’un élastique, qui s’inscrit parfaitement dans la dramaturgie du spectacle.

Car il ne faut pas s’y tromper : c’est bien et surtout de théâtre corporel qu’il s’agit ici, un peu grinçant, joyeusement foutraque, savamment décalé. S’il faut poursuivre le bonheur, et quitte à ce que cette entreprise impose une telle pression que les accidents soient inévitables, autant en profiter pour s’en moquer. Dans une escalade toujours plus invraisemblable d’inventions visuelles, les trois circassiens jouent à fond les accidents, tout en s’interpellant à tout va à coups de : « Are you happy ? » C’est souvent drôle, mais cela peut aussi devenir poignant lorsque, à bout de souffle, les corps accusent le coup de cette quête qui n’en finit jamais, et que les personnages s’effondrent – mention spéciale à Renata do Val pour son « breakdown » très physique.

Le décalage est accentué par une esthétique très DIY, avec des éléments en carton aussi improbables que réjouissants : une plage, un cheval ou une chenille géante traverseront ainsi le plateau, avec un geste graphique original et reconnaissable. « In Perhappiness » se revendique « cirque hybride à la frontière des arts vivants », et on ne saurait mieux le définir. Tel un ovni spectaculaire, il pose là sa petite réflexion philosophique sans avoir l’air d’y toucher. Comme pour toute proposition déconcertante de prime abord, il faut accepter de lâcher prise. Mais si l’on y consent, on découvre un petit bijou d’humour fantaisiste, où l’émotion passe avant tout par le corps.