(c) Mircea Kantor, extrait du film Aquila non capit muscas.

Invité phare de la Saison France-Roumanie 2019, l’artiste roumain Mircea Cantor prend ses quartiers au Musée de la Chasse et de la Nature, livrant un étrange voyage sur ses terres par une exposition plurielle mélangeant temps, espaces et dispositifs.

A la manière d’un « chasseur d’image », l’artiste juxtapose ainsi des œuvres variées, issues de sa production personnelle, de celle d’autres artistes roumains (notamment de l’école de Cluj), mais également du musée national du Paysan roumain de Bucarest, qui a prêté un certain nombre de pièces appartenant au folklore local. On y verra ainsi la lutte sans merci d’un aigle se battant avec un drone, déclinée sous forme de vidéo et de dessins et revenant comme un leitmotiv au cours de l’exposition, côtoyant des masques du folklore païen utilisés lors des rites de fin d’année, ou encore des installations contemporaines interrogeant plus directement l’histoire roumaine et ses années de dictature. Mircea Cantor, à la fois artiste et commissaire de l’exposition, s’annonce donc comme celui qui chasse et rapporte dans sa besace ses trophées, ici autant d’œuvres ramenées de Roumanie pour donner une image parcellaire de la culture roumaine dans toute sa diversité.

Or, comme toute image parcellaire de la culture de n’importe quel pays, surgit dans cette variété une profonde lacune : nous voilà invités à contempler des objets de culte – notamment ces masques surprenants qui étonnent par leur variété et leur aspect grotesque qui rappellent nos anciennes pratiques de carnaval – tout en restant à distance. Aucune explication sur leur fonction, ni sur les rites pratiqués. Comment saisir la portée du travail de l’artiste et son intérêt pour le ready-made, pour le détournement de ces pièces de folklore, sans même savoir à quoi ceux-ci renvoient ? On aurait voulu ne pas uniquement contempler un joli patchwork roumain, mais saisir quelque chose de l’âme de ce pays qui affleure pourtant dans chacune des pièces choisies. On aura une sensation vague, peut-être, ou alors on ressentira l’envie d’un voyage dans les plaines sauvages de Transylvanie, la nécessité d’aller voir de ses propres yeux. Alors, c’est à la fois gagné et perdu, ce qui souligne peut-être la difficulté de la commande dès l’origine : la Roumanie à peine effleurée et pourtant la curiosité absolument stimulée ; des images, qui restent.

L’exposition a lieu du 14 janvier au 31 mars au Musée de la Chasse et de la Nature dans le cadre de la Saison France-Roumanie 2019.